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Petit manuel de négociation
Quantifier le qualitatif

La négociation au fil de l'actualité

Cette rubrique est née d'amicales sollicitations. Souvent, tel ou tel ami me disait : mais pourquoi ne montres-tu pas la pertinence de tes outils d'analyse pour comprendre notre monde contemporain ? Pourquoi ne décortiques-tu pas, sur un plan strictement technique, ces parties d'échec que semblent disputer les Etats et les grandes entreprises ? Bref, pourquoi ne pas élaborer un petit manuel de négociation comme un "work in progress" qui permettrait à chacun de mesurer la valeur d'usage de tes conseils ?
    C'est pour répondre à cette commande bienveillante que je proposerai régulièrement, au fil de l'actualité, les réflexions d'un professionnel sur les négociations comme elles vont. Ce mois-ci, je me suis intéressé à un point de technique délicat :
    • comment négocier le qualitatif ?

    • N'hésitez pas à me faire part de vos réflexions, de vos commentaires ou de vos questions : je ne manquerai pas de les faire rebondir. .
      Bonne lecture !

Comment négocier un objectif qualitatif ?

par Marc Avelot
10 mai 2016
Conformément à notre éthique professionnelle, il ne nous appartient pas de commenter l'actualité politique. Aussi bien n'avons-nous retenu cet article du Canard Enchaîné que parce qu'il permettait d'éclairer une question technique de négociation : celui de la quantification des aspects qualitatifs d'un accord.
C'est en effet une difficulté courante sur laquelle, dans nos séminaires aussi bien que lorsque nous épaulons nos clients dans leur fixation d'objectifs, on nous interroge : comment faire pour négocier les dimensions qualitatives d'une relation ?
C'est notamment un problème que l'on rencontre souvent dans les négociations sociales où, parmi les objectifs, il n'est pas rare qu'un DRH mentionne : améliorer le climat social... Ce peut être en effet un objectif, mais comment apprécier qu'un climat social est bon et, surtout, comment apprécier qu'il s'améliore ? Le problème n'est pas moins réel dans les négociations commerciales où l'on rencontre souvent, parmi les objectifs à long terme, celui d'améliorer les relations commerciales (ou de ne pas les endommager...).
C'est en ce point que l'article du Canard Enchaîné nous a paru apporter un éclairage intéressant. Tout semble en effet se passer comme si, au sein du parti politique évoqué par l'article, à la manière du DRH pour son climat social ou comme le directeur commercial pour ses relations client, on s'était posé la question : qu'est-ce qu'un bon candidat ? et, du coup, qu'est-ce qu'un candidat "meilleur" ? Ce n'est pas, admettons-le, une mauvaise question.
L'intérêt ne tient toutefois pas dans la question mais dans la réponse apportée car, au lieu d'énoncer des paramètres très subjectifs (être convaincant, avoir du charisme, bien connaître les dossiers etc...), le problème a été ramené à des critères quantitativement évaluables :
- nombre de réunions tenues par mois
- nombre de communiqués de presse émis
- nombre de tracts distribués
- nombre d'adhérents supplémentaires
- rapidité de la mise en place des réseaux
- nombre de visites sur le site ...
en sorte que, sur chacun de ces paramètres, il est possible donner une valeur et, surtout, de repérer la hausse ou la baisse.

Eh bien, c'est de cette façon qu'il convient de procéder pour "objectiver" vos buts de négociation lorsqu'ils ressortissent au qualitatif.
Ainsi, s'agissant de notre fameux "climat social", il est loisible de surveiller :
- le nombre de jours d'absence non motivés
- les arrêts maladie (nombre et durée)
- le nombre de distribution de tracts
- le nombre de rendez-vous demandés par les représentants syndicaux
- ...
tout un ensemble d'indicateurs dont aucun à lui seul ne permet de déduire un changement mais dont la somme peut être parlante.
Cette quantification faite, il sera plus aisé d'observer le déplacement dans un sens positif ou dans un sens négatif.
Mais, objectera-t-on, comment être sûr que la quantification de départ est exacte ?
Cela n'a guère d'importance car le problème n'est pas que la quantification de départ soit exacte ou fausse mais que l'on parvienne à détecter s'il y a un déplacement des curseurs. A la limite, grâce à cette méthode, il est possible de constater qu'une situation s'améliore ou se détériore sans même connaître la situation de base.
En d'autres termes, peu importe que la photographie soit fausse pourvu que le film soit bon...


A suivre